Le mois de juin est passé à vitesse grand V : déconfinement accéléré, arrivée des beaux jours, organisation de la saison estivale dans les centres, reprise des activités, premières terrasses entre ami.e.s ou pic-nic en famille en plein air…et surtout, une floraison de Banquets Citoyens expérimentaux partout en France !
Dans les Bouches-du-Rhône, dans le Cantal, dans les Ardennes, à Paris, dans l’Aisne et en Meurthe-et-Moselle, les Banquets expérimentaux sortent de terre depuis quelques semaines et donnent à voir des équipes (de professionnels, salariés et bénévoles), des habitant.e.s, des usagers, des enfants, des jeunes, des moins jeunes débattre démocratie et justice sociale, à la sauce centres sociaux.
L’équipe nationale a participé à certains d’entre eux et on vous partage ici quelques retours sur ces retrouvailles conviviales et riches en échanges :
Photos: Lucile Barbery
Le défi fou d’organiser des débats sur la route en Ardèche dans les quinze centres adhérents du département a été relevé avec brio ! Pour en témoigner : trois villes étapes et donc, trois Banquets qui partagent ce fil rouge de l’expérimentation, tout en abordant des thématiques et préoccupations propres à chaque territoire. Ne pas automatiquement faire consensus (oui, la divergence d’opinions nourrit le débat !), ne pas juger les opinions exprimées en faisant preuve de tolérance et d’ouverture d’esprit et laisser la place à chacun.e pour s’exprimer sont les règles d’or des débats sur la route en Ardèche, comme le rappellent chaque soir Vanessa Jaume et Sarah Chion-Maugiron de la Fédération des centres sociaux en Ardèche qui débordent d’énergie et de malice !
A Tournon-sur-Rhône est arrivé un convoi d’une cinquantaine de personnes en vélo, toutes venues d’Annonay, première étape du projet. Un groupe mixte sous toutes les coutures (jeunes, seniors en vélo électrique, usagers, personnes non-voyantes sur un tandem, bénévoles, etc.) qui représente bien l’état d’esprit et la vision globale du projet. Installés ensuite sous un hall de marché couvert sur une place de la ville, habillée pour l’occasion de fanions de tissus fabriqués dans les centres ardéchois, les habitant.e.s ont pu débattre de justice et d’équité entre les personnes et échanger sur le rapport à la citoyenneté, la peur de l’Autre, l’intergénérationnel ou encore s’interroger sur l’âge auquel on devrait pouvoir voter en France !
Burzet fut la seconde étape de ce tour en vélo, dans la continuité de l’AG de la FCSF à Lyon. Situé dans un parc à l’entrée de la ville, en fin d’après-midi encore bien ensoleillée, le débat avait comme thématique « Parentalité et Féminisme », décliné en trois parties : « Si les inégalités persistent, c’est parce que les femmes ne laissent pas assez la place aux hommes », « Un garçon qui joue à la poupée, ça pose question » et « Une femme qui ne devient pas mère ne se réalise pas pleinement ».
Des affirmations « choc » qui ne peuvent que susciter de la discussion et c’est ce qui s’est ressenti sur les différentes tables, où les échanges sont allés « bon train ». Une diversité d’opinions s’est faite entendre dans un climat d’écoute active et de bienveillance de grande qualité. Les lasagnes dégustées par la suite n’en ont été que plus délicieuses !
De Burzet à Aubenas, il n’y a qu’un… coup de pédale ! Après un départ matinal à 8h30 à une vingtaine de personnes devant l’Espace de vie sociale à Burzet, nous voici parti.e.s pour 2h de vélo, dans un cadre verdoyant revigorant, pour rejoindre les collègues d’Aubenas. Les mains sur le guidons, on apprend à se connaitre, on échange, on sourit, on partage un moment suspendu dans le temps mais aussi, on se soutient, on s’attend, on s’attache à cette solidarité sincère… Une jolie manière d’apprendre et de faire collectif dans un contexte hors norme ! A Aubenas, on discute du « prendre soin de soi », on se demande si c’est un « truc de nana », si c’est « pour celles et ceux qui ont de l’argent et du temps » et si après tout, cela vaut vraiment le coup de « prendre soin de soi, puisque le monde est foutu… ! ». Sur une des tables de débat, on peut trouver Youssef qui a 11 ans et Henri qui en a 76… Et le débat opère comme par magie, dépassant tous les clivages redoutés : c’est « simplement » un grand moment d’humanité !
MJC Centre social à Tain L’Hermitage le 16 juin :
Une place publique, des cordes à linges, des planches du dessinateur Bobika impliqué sur le Buffet des Idées, un grand cercle et des chaises de couleurs…et des habitant.e.s ! C’est la recette magique du Banquet Citoyen de la MJC Centre social à Tain l’Hermitage dans la Drôme.
« Peut-on encore débattre dans l’espace public ? » : voici la question de départ qui relie Fred, Juan et Yves dans l’accompagnement de la Compagnie des Habitants, groupe d’habitant.e.s fraîchement constitués sur le territoire depuis quelques mois. En tirant le fil de ce questionnement, ils ont proposé un débat autour de trois thématiques : La culture populaire, c’est quoi ? Qu’est-ce qui fait humanité ? Les citoyens ont-ils vraiment un pouvoir d’agir pour changer les choses ?
Le public est courageux et volontaire (malgré un soleil ardent !) et prend la parole tour à tour pour s’exprimer sur les deux premières questions. La dernière a été proposée sous la forme d’un débat bocal (pour en savoir plus > Fiche Créa-Congrès du cycle 4 du Buffet des Idées), dans lequel le cercle extérieur écoute les « poissons » qui débattent dans un cercle intérieur. Les deux s’interchangent ensuite de manière autogérée. Les habitant.e.s ont vraiment joué le jeu et, malgré les divergences de points de vue, l’écoute et le respect de ce qui se disait ont guidé l’échange.
Travailler sur la prise de parole en public, faciliter l’expression, prendre confiance en soi pour débattre, discuter de manière qualitative, apprendre des nouvelles choses… Fred, Juan et Yves se réjouissent d’avoir rassemblé ces remontées des habitant.e.s après le débat, qu’ils mettent dans leur besace pour la poursuite de leur travail avec la Compagnie des habitants !
Le centre social Les Salyens/Le Bartas à Vitrolles le 18 juin :
Photos: Amélie Heroux
En fin de journée dans le Quartier des Pins à Vitrolles, on s’affaire, on prépare, on installe : un chamboule-tout de la société idéale pour les enfants, un arbre de la justice sociale (dont les feuilles sont des contributions de chacun.e), un abécédaire de la démocratie et de la justice sociale, conçu collectivement en atelier dans le centre des Salyens/Le Bartas les derniers mois, des configurations de chaises à plusieurs endroits qui promettent un débat bocal dans le cours de la soirée… Chouette, on a hâte !
Sous les balcons, à l’ombre des arbres, des tables ont été installées pour inviter les convives (complices et novices !) à débattre autour des injustices et des discriminations. Guirlandes de matériaux recyclés et de produits de seconde main, on est très attaché à l’environnement et à la lutte contre le gaspillage dans le quartier. Au centre social, les habitant.e.s y sont très sensibilisés et s’engagent individuellement et collectivement dans ces démarches.
Après avoir siroté un apéro en se baladant d’espace en espace, on rejoint les tables pour démarrer le Banquet. Avant chaque plat, on nous lit une fable, très imagée, qui permet d’introduire le sujet de discussion pour chaque séquence de débat. Ces histoires, elles viennent pour la plupart de la formation autour de la justice sociale, menée par Aequitaz, sur demande de la Fédération des Bouches-du-Rhône, dont a bénéficié une grande partie des bénévoles impliqués dans l’organisation des Banquets expérimentaux des centres à Marseille (La Garde, Le Grand Canet/Saint Gabriel) et à Vitrolles.
Sous les guirlandes lumineuses, entre deux assiettes de ratatouille et de salades faites maison par la Commission Repas du centre social (il y en avait trois : Animation de débat, Décoration, Repas), on répond, on échange et on réagit aux questions posées : « dans le quartier, quelles sont les situations d’injustices visibles ? », « Quelles sont les situations dans lesquelles nous ne sommes pas égaux du fait de notre genre, religion ou couleur de peau » et enfin, « est-ce que je pense que le centre social prend soin de moi et des autres ». Les lumières au balcon s’allument, les gens sortent et écoutent ce qui se dit dans le débat bocal en bas de chez eux…
Le mot de la fin est celui de la directrice du centre social, Anne-Christine Lizee, qui a embarqué très tôt toute son équipe et de nombreux bénévoles dans l’aventure du Banquet expérimental : « Avec cette expérience, on a envie de proposer des temps de débat plus réguliers au centre avec les habitant.e.s, sur des sujets divers, et une chose est sûre : vous pouvez compter sur nous l’an prochain ! ».
> Un florilège de photos des Banquets sur le mois de juin: